"Senegal yewuleen !" Analyse anthropologique du rap à Dakar : liminarité, contestation et culture populaire
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Thèses de doctorat
Résumé
A la fin des années quatre-vingt, on assiste à l'émergence d'une nouvelle expression culturelle au Sénégal : le hip-hop. Le rap (la forme vocale du hip-hop) a été introduit à Dakar par les jeunes des classes moyennes, qui ...Lire la suite >
A la fin des années quatre-vingt, on assiste à l'émergence d'une nouvelle expression culturelle au Sénégal : le hip-hop. Le rap (la forme vocale du hip-hop) a été introduit à Dakar par les jeunes des classes moyennes, qui avaient accès aux cassettes de rap américain ou français que leurs aînés leur envoyaient de l'étranger. Au début des années quatre-vingt-dix, ce style de musique commença à être diffusé largement dans les radios, et le rap se répandit jusque dans les quartiers les plus populaires de la ville. Au terme d'un travail de terrain de quatorze mois, j'ai essayé de déterminer comment les jeunes Sénégalais, traditionnellement tenus à l'écart du discours et des responsabilités au sein de la sphère publique, ont réussi à jouer un rôle déterminant dans la redéfinition d'un nouvel ordre, sur les plans réels et symboliques. Je me suis demandé si le mouvement rap à Dakar correspondait à la notion de mouvement social, ou revêtait plutôt la forme d'une culture populaire, s'inscrivant dans un milieu urbain. En effet, à l'horizon des élections présidentielles de 2000, les rappeurs, notamment ceux pratiquant le style hardcore, ont montré leur forte capacité à mobiliser les jeunes pour aller voter, mais aussi faire émerger une nouvelle conscience politique et sociale. La jeunesse sénégalaise, placée en situation de liminarité (concept que j'emprunte à l'anthropologue britannique Victor Turner) a ainsi réussi à réinvestir l'espace public. En outre, les rappeurs proposent une nouvelle lecture de l'histoire, de la tradition, élaborent de nouveaux codes musicaux et langagiers, mais aussi mettent en œuvre des processus d'individualisation qui leur permettent de redéfinir leur rapport à la famille ou à la religion, et notamment de l'islam, organisé le plus souvent sous forme de confréries soufies. Enfin, son évolution progressive vers la professionnalisation tend à changer sa relation à la création, et son ouverture croissante sur le monde l'amène à procéder à un rééquilibrage incessant, qui reflète les tiraillements d'une jeunesse désireuse d'appartenir à la fois à un monde « local » et « global ».< Réduire
Résumé en anglais
Since the late 1980s, there has been the emergence and spread of a new cultural and social movement in the Senegalese capital of Dakar: hip-hop. Rap (the vocal form of hip-hop) was spread throughout Dakar by middle-class ...Lire la suite >
Since the late 1980s, there has been the emergence and spread of a new cultural and social movement in the Senegalese capital of Dakar: hip-hop. Rap (the vocal form of hip-hop) was spread throughout Dakar by middle-class teenagers who had access to American and European tapes acquired through their relatives living as immigrants in these countries. In the beginning of the 1990s, this music was broadcast on the radio which led to an expansion of the listening audience, reaching lower-class youth in the disadvantaged suburbs of Dakar. Following fourteen months of fieldwork in Dakar and its surrounding suburbs, I tried to determine how Senegalese young people, traditionally discouraged from participating in public discourse and responsibilities in general, managed to play a determining role in the redefinition of a new Senegalese social order, both in real and symbolic terms. In a context of presidential elections and social protest, many young people ventured into this new kind of artistic expression which consisted of a progressive africanization of this western form. I wondered whether this “rap movement” matched the description of a social movement or rather was an African popular culture in an urban context. Subsequently, the main issue was first to understand how a form of African creative expression like Rap in Dakar could be involved simultaneously in cultural, social, religious and political spheres. Additionally, rappers not only offer a new interpretation of Senegalese history and tradition, but they also create new musical and language codes. They also allow for the redefinition of their relationship to the family and religion, notably Islam in the form of Sufi brotherhoods. Finally, rap's gradual movement away from an informal activity towards a professional one has tended to change its mode of creation and its opening toward the world makes rappers constantly adjust between the local and the global.< Réduire
Mots clés
Rap
Hip-Hop
Culture populaire
Afrique subsaharienne
Sénégal
Dakar
Ville
Jeunesse
Anthropologie
Politique
Islam
Musique
Mots clés en anglais
Popular culture
Subsaharan Africa
City
Youth
Urban
Anthropology
Politics
Music
Origine
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