Les équilibres (et déséquilibres) en jeu en matière de conservation de la nature : analyse réflexive de deux missions de terrain (Réserve de l’Amana, Guyane ; Parc National Wild Nephin, Irlande)

Abstract

La conservation de la nature a connu au cours des trente dernières années des évolutions paradigmatiques importantes. Les approches fondées sur la valorisation des équilibres de la nature (balance of nature) sont bousculées par la reconnaissance du rôle des perturbations, des contingences historiques et de la variabilité spatiale des socio-natures. Les héritages coloniaux et post-coloniaux qui marquent les pratiques de conservation, principalement dans les Suds mais également dans les Nords, sont contestés. Enfin, le changement global fait voler en éclats les certitudes des acteurs de la conservation, depuis les laboratoires de recherche jusqu’aux espaces concernés par des projets de restauration écologique ou de ré-ensauvagement. Les vieux modèles de référence (wilderness ou nature pastorale patrimonialisée), s’affrontent et sont remis en question. Dans ce contexte d’instabilité, les discours et stratégies des acteurs de la conservation de la nature sont en pleine mutation. Leur analyse permet de repérer des modèles émergents qui s’arriment à des solutions globales de réponse à la crise environnementale à l’échelle planétaire. Ces solutions peuvent être socialement et spatialement inclusive ou ségrégative. Cette communication, prenant appui sur le paysage instable de la conservation décrit ci-dessus, est issue de différentes recherches conduites en géographie. Elle est fondée sur une mise en récit réflexive, via le recours au texte, à la carte et à l’image, de trois expériences de terrain réalisées en 2019. Cette proposition, vise à contribuer à l’axe 3 (environnement) de l’appel à communication et de manière complémentaire elle peut aussi alimenter les réflexions sur le pouvoir (axe 2). Enfin, plus largement, cette communication s’inscrit dans les champs interdisciplinaires de la <i>Political Ecology</i> et des humanités environnementales, qui peuvent constituer un espace de rencontre pour les géographes et les civilisationnistes. Les deux terrains mobilisés sont ceux de l’estuaire du Maroni en Guyane et du parc national du Wild Nephin Ballycroy en Irlande (Mayo). Nous revisitons ces expériences de terrain d’une manière distanciée afin d’analyser plus spécialement les tensions entre équilibres et déséquilibres qui caractérisent ces espaces d’enjeux en matière de conservation de la nature. Nous verrons comment ces tensions peuvent aussi affecter les postures des chercheurs impliqués.