Introduction journée d'étude « Towards an ethology of voluntary servitude », 28 octobre 2022 (MSH Bordeaux)
Langue
fr
Ce document a été publié dans
2022-10-28
Résumé
Disons donc ainsi, qu’a l’homme toutes choses lui sont comme naturelles, a quoy il se nourrit et accoustume ; mais cela seulement lui est naïf, a quoi sa nature simple et non altérée l’appelle ; ainsi la premiere raison ...Lire la suite >
Disons donc ainsi, qu’a l’homme toutes choses lui sont comme naturelles, a quoy il se nourrit et accoustume ; mais cela seulement lui est naïf, a quoi sa nature simple et non altérée l’appelle ; ainsi la premiere raison de la servitude volontaire c’est la coustume : comme des plus braves courtaus qui au début mordent le frein et puis s’en jouent ; et là ou n’agueres ruoient contre la selle, ils se parent maintenant dans les harnois, et tous fiers se gorgent soubs la barde. Ils disent qu’ils ont été toujours subis ; que leurs peres ont ainsi vescu ; ils pensent qu’ils sont tenus de dendurer le mal, et se font accroire par exemple, et fondent eus mesmes soubs la longueur du tems la possession de ceux qui les tirannisent, mais pour vrai les ans ne donnent jamais droit de mal faire, ains agrandissent l’injure».Selon La Boétie, « la coutume » (l’habitude) est une seconde nature qui rend l’asservissement acceptable. L’analogie entre le comportement humain et le comportement animal permet d’étayer cet argument, mais soulève une question qui est restée largement sans réponse : est-il possible d’identifier les présupposés anthropologiques ou, réciproquement, éthologiques de la « servitude volontaire » ? L’objectif de cet atelier interdisciplinaire est de mettre à l’épreuve cette notion clé de la philosophie politique en réunissant des disciplines et des chercheurs qui s’interrogent sur les fondements de l’« humain » et du « social ».Ces dernières années, s’est imposée la tendance à réexaminer les questions classiques des sciences sociales à travers une approche de type naturaliste. Par exemple, les paléo-anthropologues et les archéologues ont exploré l’évolution de la musique, de la religion, de la parenté, de la moralité, de la transmission culturelle, de l’économie et du langage. Cependant, relativement peu d’attention a été accordée jusqu’à présent à l’organisation politique des groupes humains. Dans cette perspective, recadrer la question classique en philosophie politique de la « servitude volontaire » revient à dater et à situer les scansions et les processus à long terme qui ont conduit l’Homo sapiens à privilégier les formes verticales d’organisation sociale ; à identifier les exceptions possibles dans les mondes humain et animal ; à s’interroger sur la relation entre ce choix de développement et certaines compétences cognitives telles que l’évolution du langage ou la production d’artefacts.Cette réinterprétation du concept clé de La Boétie s’adresse potentiellement aux disciplines qui étudient l’évolution humaine et la place de l’homme dans la nature (éthologie, primatologie, paléoanthropologie), les sociétés et institutions humaines (archéologie, anthropologie, ethnologie), la psychologie humaine et la prise de décision (neurosciences, sciences cognitives, psychologie). L’approche naturaliste des formes d’organisation sociale n’est pas spécifique à La Boétie. Par exemple, les philosophes de l’ère moderne qui ont pensé à l’émergence de la société civile sous la forme d’un contrat tacite se sont appuyés sur des mythes classiques ou des récits ethnographiques. L’expérience intellectuelle que propose cet atelier interdisciplinaire, sur la base de découvertes scientifiques récentes, peut donc être répétée dans d’autres cas. La réussite de cette expérience implique deux conditions préalables : une connaissance partagée du texte de La Boétie et la volonté de tous les participants de sortir de leurs certitudes disciplinaires.< Réduire
Mots clés
Servitude Volontaire
Sciences de l'homme et de la Société
Origine
Importé de halUnités de recherche