Pour une approche pragmatique des relations hiérarchiques : efficacité de l’action, dissymétrie des positions, gradation des statuts à Wallis.

Abstract

L’opposition hiérarchique telle que la conçoit Louis Dumont implique le primat en valeur d’un des termes de la relation et l’englobement du second qui apparaît, à ce niveau subordonné, comme son contraire. L’intérêt de ce modèle analytique et sa portée heuristique ont été montrées pour ce qui concerne la compréhension des faits sociaux, notamment dans le Pacifique, où il permet de rendre compte de l’organisation des sociétés à statuts de Mélanésie et de Polynésie.À partir de l’ethnographie wallisienne, cette contribution propose la compréhension du fonctionnement de l’opposition hiérarchique en changeant de perspective. La question de l’organisation de ce que Dumont a appelé les « idées-valeurs » sera (provisoirement) laissée de côté pour une approche plus pragmatique des interactions où les relations sociales trouvent à la fois forme et signification. Dans ce cadre, l’étude focalise sur la position particulière qu’implique l’« ancienneté », à savoir l’instauration d’une relation dissymétrique où l’« ancien », de statut supérieur, se trouve en position de médiation avec les autres entités du monde socio-cosmique (anciennes déités, ancêtres et Dieu) au bénéfice de « puinés » (dépendants). De cette relation, et de la dissymétrie qui la caractérise, des effets sont attendus en termes de réussite et d’autorité qui sont éprouvés, évalués et validés. Si le primat en valeur de l’« ancienneté » organise ainsi la société du point de vue de son idéologie, il est aussi au fondement des dynamiques sociales : nécessitant la réitération de l’efficacité qu’il suppose – donc la manifestation et la validation de cette dernière – il implique un engagement incessant des personnes dans le monde sociocosmique où elles trouvent place dans une gradation de statuts toujours retravaillée.