Les "crises", les prisons et Mandela au Burundi : des contentieux carcéraux aux réformes pénitentiaires (1993-2020)
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La Prison au-delà des frontières, La Prison au-delà des frontières. 2020-09p. 101-113
Les Presses de l'ENAP
Résumé
Enserré dans une Afrique des Grands lacs souvent instable, le Burundi a traversé depuis plus d’un demi-siècle des « crises » à répétition dont la violence et l’intensité ont profondément marqué la société, mais aussi l’Etat ...Lire la suite >
Enserré dans une Afrique des Grands lacs souvent instable, le Burundi a traversé depuis plus d’un demi-siècle des « crises » à répétition dont la violence et l’intensité ont profondément marqué la société, mais aussi l’Etat et ses institutions. Près d’une dizaine de crises graves ont de la sorte ponctué l’histoire burundaise depuis son indépendance en juillet 1962, avec leur lot de morts, de blessés, de disparus, de déplacés internes, d’exilés et de prisonniers (1965, 1969, 1971, 1972-1973, 1988, 1991, 1993-2008 et depuis 2015).Dans ces tragédies périodiques, le système carcéral, au-delà de ses fonctions de contrôle social exercé depuis la colonisation sur les couches les plus défavorisées de la population, a toujours été utilisé comme un instrument de conservation du pouvoir et d’élimination des oppositions politiques ou ethniques. Les prisons se sont trouvées submergées par des afflux de détenus mis en cause pour des infractions de nature politique, ou de droit commun mais utilisées à des fins politiques . Des contentieux pénitentiaires concernant des centaines ou des milliers de prisonniers ont ainsi été créés, qui sont devenus des enjeux dans les phases de sortie de crise ou de négociations de paix. Leur règlement a suscité et alimente encore d’intenses débats sur la catégorie « politique » des détenus, sur le détournement de l’institution pénitentiaire à des fins de coercition partisane, et sur les conditions dans lesquelles des détenus enfermés en masse peuvent être massivement libérés. Mais aussi, et c’est ce qui retiendra l’attention ici, ces « crises » et leur dénouement semblent représenter des moments uniques d’action sur le système pénitentiaire, en créant les conditions de sa transformation.Cet article traite du contentieux carcéral dit « de 1993 », qui couvre en fait une situation générée au cours d’une longue guerre civile étalée entre 1993 et 2008, de sa portée sur le système des prisons au Burundi, et des plus récentes évolutions qui touchent celui-ci. Les sources sur les excès carcéraux lors des crises précédentes sont lacunaires, tandis que le débordement des prisons à partir de 1993 est mieux renseigné, et bénéficie d’une documentation et de témoignages que j’ai pu recueillir au cours d’enquêtes menées entre 2010 et 2019 . L’analyse de ce contentieux, précédée d’une partie en retraçant la genèse, permet de saisir les controverses qu’il a nourries et les modalités par lesquelles des milliers de prisonniers ont été affranchis dans les années 2000. Elle permet aussi d’éclairer les transformations qui ont accompagné le règlement de la crise carcérale, et le poids des acteurs étrangers et nationaux dans celles-ci, parmi lesquels Nelson Mandela est une figure tutélaire. Un détour vers le temps présent permettra enfin de questionner les rationalités rivales qui inspirent des réformes tantôt tempérantes, tantôt régressives.< Réduire
Mots clés
Burundi
Prison Histoire
Nelson Mandela
Project ANR
Économies de la peine et de la prison en Afrique - ANR-15-CE27-0007
Origine
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