Dynamique d'allocation du phosphore prélevé et de sa remobilisation pendant le remplissage du grain chez le blé dur

Abstract

Une des pistes pour gérer durablement le phosphore (P) dans les agrosystèmes consiste à diminuer les exportations répétées du P avec les récoltes. La teneur en P des produits récoltés, en particulier les grains, est alors un paramètre clé dans la gestion du cycle du P dans les agrosystèmes. Au cours de la période postfloraison, l’accumulation du P dans les grains dépend de l’absorption post-floraison et de la remobilisation du P des organes végétatifs. Cependant les processus écophysiologiques qui régissent le remplissage des grains en P et la contribution des deux sources sont encore mal connus. Les objectifs de cette thèse étaient de mieux comprendre les processus impliqués dans le remplissage des grains en P et de déterminer la contribution de la remobilisation et de l’absorption post-floraison au P des grains chez le blé dur (Triticum turgidum. L). Trois expérimentations ont été réalisées en conditions contrôlées avec un système de culture hydroponique permettant de contrôler l’offre en P. D’abord, les effets de la privation en P pendant la période post-floraison sur la remobilisation et les teneurs en P des grains ont été analysés chez deux cultivars de blé dur. Ensuite, l’utilisation du traçage isotopique du P exogène a permis d’étudier la dynamique fine du P durant la période post-floraison et son transport aux grains. Les résultats obtenus montrent que la croissance des grains n’est pas limitée par l’offre en P pendant la période post-floraison si les plantes sont suffisamment alimentées en P pendant la phase végétative. En effet, la privation en P appliquées à partir de la floraison n’a pas eu d’effet négatif sur le rendement et sur la qualité des grains, malgré la diminution significative dans la teneur en P des grains. Nous avons également montré que les flux de remobilisation augmentent en conditions de limitation en P. Le marquage au 32P de la floraison à la maturité a permis de montrer que la remobilisation du P représente 81 % du P des grains pour les plantes cultivées avec un faible niveau en P tandis qu’elle représente 65 % pour les plantes cultivées avec un niveau élevé en P. Les deux marquages successifs au 32P au cours du développement des grains révèlent que le P absorbé par les racines pendant la période post-floraison n’est pas directement alloué aux grains via le xylème. Enfin, ce travail ouvre de nouvelles perspectives pour améliorer l’efficience d’utilisation du P en limitant les exportations répétées de P et ses conséquences environnementales et sur la qualité nutritionnelle des grains.