Des femmes en situation de précarité comme groupe moteur de création de jardins partagés

Abstract

SaluTerre, basé à Sainte-Foy-la-Grande (33), est un bureau d’études en ingénierie paysagère. Créée en 2004, la SCOP réalise de l’assistance à maîtrise d’ouvrage pour les collectivités territoriales et autres acteurs de la fabrique du territoire (promoteurs immobiliers, bailleurs sociaux, etc.) dans la création de projets alimentaires paysagers. Elle est une structure « fille » de l’association Les Jardins d’Aujourd’hui fondée en 1986 et dont Eric Prédine et Franck David, fondateurs de SaluTerre, étaient respectivement directeur et salarié. Le premier jardin partagé du quartier du Grand Parc (1988) fait partie des actions de ces deux paysagistes-jardiniers, ainsi que la création du réseau national du Jardin dans Tous Ses Etats, réseau des jardins partagés (1997). Parallèlement à ses actions de terrain, SaluTerre développe une activité de recherche-action autour de l’inclusion et du paysage alimentaire.Il s’agira, dans cette proposition de poster, de s’emparer d’une recherche monographique menée sur les jardins partagés du Grand Parc de Bordeaux (résultats en cours de publication dans la revue Développement Durable et Territoires, Robert, 2023) pour questionner le rôle des femmes dans la conception, l’animation et l’exploitation de ces jardins. Par étude de cas, nous entendons un comparatif entre les premiers jardins partagés dits de Cluny de la fin des années 1980 et ceux, plus récents, liés au renouvellement urbain du quartier entrepris par la municipalité. Les jardins de Cluny, qui prenaient place sur des parcelles mises à disposition par les sœurs du prieuré de Cluny, ont d’abord été cultivés par des femmes, mères de famille de 30 à 50 ans en situation de précarité, accompagnées par une conseillère en économie sociale et solidaire. Si le genre du groupe « jardinant » est féminin, il l’est également pour les autres personnes impliquées dans le projet de jardin. Selon Éric Prédine, il n’est pas anodin que ce soient des femmes qui impulsent la mise en place des jardins partagés selon des méthodes concertées, plus à même d’agir dans le care et dans l’incertitude (Gilligan, 2009) : « Je crois que les femmes sont beaucoup plus sensibles à cette méthode où, de la discussion, naissent la réflexion et l’action. D’autant que l’amélioration du cadre de vie au quotidien leur semble une priorité » (Prédine, 2009, p. 29). La phase récente de mise en place concertée des jardins partagés suit les mêmes logiques de répartition genrée. En effet, la majorité du public présent lors des ateliers de concertation est féminin, où des groupes de femmes s’impliquent par désir de se retrouver en famille ou entre amies ; la présence des hommes se conforte à mesure que les jardins murissent et se matérialisent. Le poster propose ainsi d’illustrer l’étude de cas par des photographies et verbatims issus d’archives et d’entretiens menés avec différentes personnes impliquées dans les deux jardins.