À la recherche de l’'ingénierie durable' : le déplacement militant de l’engagement écologiste

Abstract

L’intensité croissante des effets visibles du changement climatique, combinée aux scénarii alarmants du GIEC, semble inaugurer une nouvelle séquence pour les mouvements sociaux écologiques en France, comme l’illustrent les « marches pour le climat » et les occupations organisées par Extinction Rebellion. On observe concomitamment dans le milieu des ingénieurs un double phénomène : d’une part, un sentiment de « perte de sens » au sein de ses membres, notamment par souci de cohérence entre les orientations du métier et les pratiques préconisées par le développement durable; d’autre part, l’émergence de nombreux collectifs associatifs précisément engagés sur ces enjeux. Outre des questions d’ordre scientifique et technique, c’est la responsabilité sociale, économique et politique des ingénieurs qui est interrogée dans les deux cas. C’est donc finalement l’ensemble de leurs cadres de perception et d’interprétation du monde, élaborés par leur formation et fondés sur une certaine idée du progrès, qui sont remis en cause. L’appropriation individuelle et collective des principes du développement durable au sein des mouvements sociaux laisse dès lors apparaître une pluralité de représentations sur ses enjeux et ses moyens d’action légitimes, qui constitue autant de conceptions sur le rôle et la place des ingénieurs dans la société.