La Gascogne sous les premiers Plantagenêt (1152-1204)

Abstract

Au moment où s’éteignait Aliénor d’Aquitaine et où tombaient successivement la Normandie, l’Anjou, le Maine et une grande partie de l’Aquitaine, l’ancien duché de Gascogne, qui n’avait eu qu’une position marginale dans les possessions des Plantagenêts, est devenu le principal fief continental des rois-ducs. Cette singularité dura jusqu’à la fin de la guerre de Cent ans. De cette « Gascogne anglaise », celle des XIVe et XVe siècles est la mieux connue grâce aux recherches des médiévistes anglais (E. Lodge, M. Chaplais, M. Vale…) ou français (P. Capra, J.-P. Trabut-Cussac, F. Lainé, et plus récemment P. Barnabé). En revanche, si l’on excepte ceux de J. Boussard, peu de travaux se sont intéressés à la Gascogne des premiers Plantagenêts, à son organisation et à la politique des rois-ducs.Le duché de Gascogne, s’étendant de l’estuaire de la Gironde aux Pyrénées, était sous la suzeraineté des comtes de Poitiers depuis le milieu du XIe siècle. L’autorité ducale s’appuyait sur le cœur du duché, Bordelais et Bazadais au nord, Labourd et Chalosse au sud, mais sur les confins de l’Armagnac ou de la Bigorre celle-ci était moins nette. Le processus de recul de la suzeraineté ducale, commencé bien avant le XIIe siècle, se poursuivait activement dans la seconde moitié de ce siècle, avec les hommages du Béarn, de la Bigorre ou du vicomte de Tartas en faveur des rois d’Aragon et de Navarre. Entre 1154 et 1199, l’action d’Henri II et de Richard a surtout été dictée par la volonté de limiter ce recul et de relever l’autorité ducale. Des expéditions militaires ont été conduites contre le baronnage gascon en 1169 à Saint-Macaire, en 1175 en Agenais, en 1177 en Chalosse, Labourd et Cize, en 1181 en Lomagne. Les réseaux familiaux des vicomtes de Béarn ont été régulièrement visés. En même temps, l’assise administrative a été progressivement étoffée avec un sénéchal et des justiciers. Quelques nouveaux châteaux ducaux ont appuyé cette reprise en main (La Réole, Le Cros, Bayonne, Marmande ?). En Bordelais, où la documentation a été plus exhaustivement dépouillée, la fiscalité ducale s’est nettement alourdie et de nouveaux usages féodaux ont été introduits.