Variabilité climatique rapide pendant le dernier glaciaire : nouveaux apports chronologiques des séquences loess-paléosols du Nord de la France

Abstract

Les séquences lœssiques de la dernière période glaciaire (Weichselien) offrent une fenêtre privilégiée sur l'histoire continentale et permettent d'étudier les fluctuations climatiques millénaires et la dynamique du paléo-pergélisol. L'évolution de ces environnements en réponse aux changements climatiques se traduit par la formation d'une stratigraphie complexe et diversifiée, caractérisée par des alternances cycliques de loess et de paléosols. La présence d’horizons-repères pédologiques, stratigraphiques et périglaciaires dans toute l'Europe occidentale facilite leur corrélation à grande échelle. bien qu’ils ne soient pas toujours conservés rendant la reconstruction chronoclimatique un défi constant. Toutefois, les progrès récents dans les méthodes de datation permettent désormais d'établir des chronologies à haute résolution, offrant ainsi la possibilité d'analyser et de discuter de l'impact des événements climatiques rapides à l’échelle millénaire dans l’intervalle de datation par le radiocarbone. Dans ce contexte, le projet d’élargissement du Canal Seine-Nord Europe (CSNE) fournit une opportunité unique d’accéder, sur la longue distance, à une information stratigraphique et paléoenvironnementale remarquable pour la France septentrionale. En effet, ce projet d’aménagement a impliqué des opérations de sondages profonds dans le cadre d’un diagnostic d’archéologie préventive en 2023 dans le secteur d’Hermies (Pas-de-Calais). L’accès aux coupes du diagnostic préventif a pu être possible grâce au responsable de l’opération P. Feray. Plus au nord, deux terrassements en pyramide inversée ont pu être réalisés au cours d’opérations archéologiques à Haynecourt et Onnaing menées respectivement par Archéopole (H. Assemat dir.) et l’Inrap (F. Feray dir.). Ces chantiers ont rendu possible l’observation du Début Glaciaire sous la forme d’un complexe épais de 2 m, et du Pléniglaciaire supérieur sur plus de 8 m. L’étude de ces séquences a bénéficié d’une approche analytique multi-indicateurs en continu et à haute résolution (5 cm) : granulométrie et carbone organique total. Un total de 11 lames micromorphologiques ont été réalisées par P. Dugas (PACEA), et la datation des différentes unités et sols composant ces séquences est assurée par les méthodes de la luminescence optiquement stimulée sur les grains de quartz (M. Richard, Archéosciences) et du radiocarbone sur granules calcitiques de vers de terre (C. Hatté, LSCE). Cette dernière approche est particulièrement importante car elle est actuellement la seule permettant de corréler les changements climatiques rapides du Pléniglaciaire moyen et supérieur enregistrés dans les glaces du Groenland aux horizons pédogéniques des séquences lœssiques contemporaines.