La métallurgie du fer en Grèce ancienne à travers l’exemple de la cité d’Érétrie. Méthodes et perspectives

Abstract

Le fer et ses alliages jouaient un rôle essentiel durant l’Antiquité. Les témoins matériels mis au jour, de l’outillage à la construction, en passant par l’armement, en sont une parfaite illustration. Mais qu’en est-il de la fabrication de ces objets indispensables aux activités du quotidien ? Que dire de l’organisation du travail et des espaces de production, ou encore des modalités d’approvisionnement et d’économie des matières premières ?La recherche actuelle, menée dans le cadre d’une thèse de doctorat en collaboration avec l’École suisse d’archéologie en Grèce, a pour objectif d’explorer ces questionnements et d’apporter un éclairage inédit sur la sidérurgie en Grèce ancienne, à travers l’exemple d’Érétrie.Située en Eubée, en face de l’Attique, Érétrie est une cité importante disposant d’un riche éventail de ressources exploitées dès l’Antiquité. Faisant l’objet d’une activité archéologique intense menée de longue date, la région a également livré un grand nombre de vestiges caractéristiques. Au sein de l’espace urbain, les fouilles récentes ont ainsi mis au jour plusieurs contextes liés à des activités de forge, couvrant une période allant du VIIIᵉ au IIIᵉ siècle avant notre ère. Les programmes de prospection successifs, quant à eux, font du territoire érétrien l’un des mieux connus du monde grec.Entre histoire, archéologie et archéométrie, le projet vise non seulement à appréhender les choix techniques opérés dans le processus de fabrication et de mise en œuvre du fer, mais cherche également à documenter l’organisation du travail et la gestion des ressources du sous-sol à l’échelle de l’espace érétrien. Dans cette optique, des prospections thématiques sont en cours afin d’identifier plus précisément les gisements et sites sidérurgiques du territoire.Dans un second temps, l’examen métallographique du matériel collecté doit permettre de caractériser les gestes des anciens artisans : les microstructures des scories renseignent sur les ajouts de matière, volontaires ou non, au cours du processus ; celles du fer métallique, qu’il s’agisse de chutes ou d’inclusions dans les scories, donnent à voir la nature du métal employé, les traitements thermiques, ou encore les contraintes mécaniques subies par le matériau.Parallèlement, plusieurs indices au sein des vestiges peuvent permettre de remonter le fil de la chaîne opératoire et de livrer de précieuses informations sur l’approvisionnement en matière première. Dès l’examen microscopique, une attention particulière sera portée aux inclusions charbonneuses, afin de documenter la nature du combustible employé pour alimenter la filière. De plus, des analyses élémentaires par ICP-MS permettront de déterminer la signature chimique d’une ou plusieurs zones de production, voire d’un minerai particulier.À terme, ce travail doit permettre d’améliorer notre connaissance de la métallurgie du fer érétrienne, de son organisation et de sa place dans le paysage artisanal local, mais également de ses évolutions au cours de la période étudiée. Au-delà du seul cas érétrien, il s’agit aussi d’une occasion d’apporter un éclairage inédit sur un objet d’étude encore peu exploré dans le champ de l’archéologie grecque.