Circulation des savoirs dans le mouvement des vins nature : une analyse multi-scalaire depuis les vignobles du Cap et de Bordeaux

Abstract

Cette recherche prend pose pour point de départ la construction du mouvement des vins nature en opposition aux normes, valeurs et pratiques des vins conventionnels, c’est-à-dire des produits manufacturés issus de l’agro-industrie : les enjeux de démarcations et stratégies de marginalité des vignerons nature y sont interrogées. Si les dynamiques de controverses et de conflictualités entre les acteurs du mouvement nature et le reste de l’industrie vitivinicole sont au cœur de cette recherche, cette communication se propose plus spécifiquement d’interroger la dimension multi-scalaire du mouvement. En effet la communication questionne la construction du mouvement nature en tant que réseau transnational porteur de valeurs globales mais marqué par des ancrages locaux forts et des savoirs situés. L’approche multi-scalaires adoptée ici invite à penser à diverses échelles les enjeux suivants : 1.Les interdépendances des différentes échelles dans le mouvement nature depuis le très local (en partant des cas du vignoble bordelais et celui du Cap) jusqu’au très global (le marché du vin dans sa dimension globalisée) ;2.Les interrelations des acteurs du mouvement nature face au reste de l’industrie. Bien que niche, l’idée ici est de mettre en exergue la prolifération des acteurs du mouvement des vins nature à échelle internationale : elle représente à la fois un nouveau segment de marché, mais également l’émergence de nouveaux discours et pratiques qui prônent de retisser les liens avec l’environnement (le vignoble en tant qu’écosystème) et plus généralement les non-humains (à la vigne sans les produits phytosanitaires, au chai sans les intrants chimiques). 3.Les dynamiques de circulation des savoirs et savoir-faires quant à cette nouvelle manière de produire du vin. Cette dernière partie, au-delà de la question des échelles, se propose de questionner l’imbrication des différents registres de savoirs (scientifiques, expérientiels, sensibles) qui sont mobilisés par les acteurs du mouvement nature pour justifier leurs pratiques. Cette communication est issue d’un travail de thèse mené depuis 2020. Cette thèse s’appuie sur un terrain multi-situé. Deux périodes d’immersion dans les terrains ont été réalisée (9 mois dans le Bordelais et 9 mois dans la Province du Cap). Le terrain se base sur un dispositif méthodologique mixte : plus de quatre-vingts entretiens réalisés auprès de professionnels de la filière, une immersion longue qui a permis de nombreuses sessions d’observation participante. En parallèle, des données ont été collectées en vue de réaliser une analyse de réseau qualitative. La mobilisation des méthodes d’analyse relationnelles est soutenue par la théorie de l’acteur-réseau (Actor-Network-Theory) qui permet ici de se concentrer sur l’agentivités entre acteurs mais également entre humains et non-humains.