Les problèmes de communication entre les soignants et les femmes enceintes autour de la prise en charge du paludisme dans un hôpital du Sud Cameroun

Abstract

Introduction: Cette étude porte sur la prise en charge du paludisme chez les primipares à Kribi. Elle met l'accent sur les problèmes de communication entre le personnel de santé et les parturientes à l'hôpital central et l'hôpital presbytérien de cette ville. Cette étude anthropologique est réalisée dans le cadre du projet PAL+ « Traiter et/ou Prévenir. Mères, enfants et soignants face au paludisme » du Ministère de la Recherche, France.Methods: L’enquête de terrain a été réalisée pendant 3 mois, au cours du premier semestre 2004. Nous avons enquêté auprès du personnel médical et infirmier (12 personnes) du service des soins prénataux à l'hôpital public et à l'hôpital presbytérien. Des entretiens ont été réalisés auprès de 45 primipares rencontrées dans ces formations médicales et complétés par des observations directes lors des consultations à l'hôpital. L’enquête a étéréalisée à Kribi, ville balnéaire du Sud Cameroun, située dans la région forestière du pays où le paludisme sévit en permanence.Results: Nous avons constaté que le personnel des consultations prénatales communique peu avec les femmes enceintes et en particulier les primipares : - les échanges sont laconiques et organisés sur le mode instructions/ordres, ce qui induit un rapport hiérarchisé de type subordonnée/supérieur, - les éléments inscrits sur le carnet de santé lui sont rarement expliqués. Il est intéressant de mentionner que dans un premier temps, il lui est prescrit une série d'examens sans explication sur l'importance de ceux-ci et la nécessité de les subir. Lorsque ces examens sont faits, une ordonnance est prescrite. La parturiente, qui ignore de quoi elle souffre, est sommée d'acheter les médicaments et de les consommer. L'absence de communication nous amène à nous intéresser aux multiples implications de cette attitude qui ont une incidence sur la prévention et l'observance. Ces actes mécaniques du personnel de santé n'informent pas la primipare sur le danger que constitue le paludisme, et encore moins sur les moyens de le prévenir. Sans explication il est difficile pour le profane d'établir une corrélation entre le paludisme et ses complications dans la mesure où ses symptômes (fièvre, maux de tête..) sont similaires à ceux d'autres pathologies. Conclusion : Ce travail pose la question plus générale de l’observance des traitements chez les primipares et leurs façons de s'approprier l'initiative de la prévention et de la demande des soins. L’insuffisance de communication entre soignants et parturientes a une incidence certaine sur l’observance, mais aussi sur la prévention et l’itinéraire thérapeutique. Sans explications, il est difficile aux femmes enceintes d’établir une corrélation entre le paludisme et ses complications dans la mesure où le polymorphisme symptomatologique de cette affection entraîne des confusions avec d’autres maladies. Ceci influence l’itinéraire diagnostique et thérapeutique qui privilégie « le sens du mal » à l’explication biomédicale et souvent le choix du recours au guérisseur ou au vendeur de médicaments de rue avant celui du médecin.