Être une femme usagère ou vendeuse de substances : vulnérabilités et capacité d'agir

Abstract

Les femmes usagères de substances sont minoritaires dans les structures de prise en charge des addictions (Vitte, 2018), et parmi les interpelés pour vente ou usage de stupéfiants par la police (Barbier, 2018). L'influence de l'identité de genre féminine sur les consommations, ventes et achats de drogues est donc méconnue (Maher et Hudson, 2007). Cette communication a pour but de combler cette lacune. Les résultats présentés sont issus de ma thèse en sociologie, et reposent sur 38 entretiens (26 femmes, 12 hommes) réalisés avec des personnes usagères de substances à Bordeaux (France). Consommer des substances quand on est une femme génère à la fois des vulnérabilités et des capacités d'agir. Une association est souvent faite entre usages de substances féminins et disponibilité sexuelle,dans une vision morale associant féminité, drogues et décadence. Plusieurs femmes rapportent avoir été agressées sexuellement dans un moment de consommation ou d'achat. Les femmes sont moins prises au sérieux et font plus souvent l'objet de tentatives d'escroqueries que les hommes. Les participantes affirment parallèlement avoir retiré des compétences comportementales et commerciales de leurs trajectoires déviantes. Elles ont développé des capacités d'agir directement issues de leurs vulnérabilités, qui leur permettent de se protéger de la police ou d'obtenir des avantages de leur position genrée. Ces femmes jouent avec leur genre et leurs stigmates selon les circonstances.